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Féru de littérature française et étrangère, ma plume sévit dans diverses colonnes de journaux, de sites internet pour partager ce goût qui m´anime. Que détracteurs ou admirateurs n´hésitent pas à réagir à mes chroniques.

lundi 31 juillet 2017

La mort de Sam Shepard.

 
Samuel Shepard Rogers III dit Sam Shepard vient de s´éteindre à l´âge de 73 ans à Midway dans l´Etat de Kentucky aux Etats-Unis. Né le 5 novembre 1943 à Fort Sheridan(Illinois), il était acteur mais aussi dramaturge, metteur en scène, scénariste, réalisateur et producteur.
Au milieu des années soixante-dix il a écrit sa trilogie sur la famille : Californie, paradis des morts de faim(Curse of the Starving Class (1976), L'Enfant enfoui (Buried Child, 1979) et L´Ouest, le Vrai (True West, 1980). Deux de ses pièces ont remporté le prestigieux Tony Award. Il a reçu en outre le Prix Pulitzer de l´oeuvre théâtrale en 1979 pour L'Enfant enfoui (Buried Child). Il a aussi remporté plusieurs Obie Awards, dont celui de la meilleure pièce et de la meilleure mise en scène pour Fool for Love (1983), qui s'attaquait, à l'instar d'autres de ses œuvres, aux mythes du cowboy vertueux et de la morale américaine.Il a également écrit des romans et des nouvelles.
Il a signé seul les scénarios de nombreux films et a collaboré avec de grands noms du cinéma comme Michelangelo Antonioni, Wim Wenders et Robert Altman. Il  a aussi tenu de nombreux rôles au cinéma et remporté des prix d´interprétation. 
C´est un nom important de la culture américaine qui disparaît. 

samedi 29 juillet 2017

Chronique d´août 2017.



Gilles Lapouge, l´alchimiste de la réalité.

Dans son édition de septembre 2006, Le Magazine Littéraire l´a surnommé «le voyageur sentimental». Celui qui a bourlingué un peu partout, en savourant les spécificités de chaque endroit visité, qui a glorifié dans ses écrits les richesses du monde, a plus de quatre-vingt-dix ans, mais on dirait que son esprit aventurier et sa boulimie de mirages ont rajeuni Gilles Lapouge.
Né en 1923 dans une famille de militaires, il a passé son enfance en Algérie et ses vacances près de Digne, son lieu de naissance. Dans les années quarante, il a fréquenté Sciences-Po à Paris, mais cet académisme amidonné n´allait pas de pair avec sa nature nomade et il est parti à l´aventure épaulé par la littérature, ce terrain, de son propre aveu, de la liberté et de l´égarement. En 1950, il s´est retrouvé donc au Brésil, recommandé par Fernand Braudel, où il a fait la découverte du fleuve Amazone qui l´a ébloui. Il a rédigé des articles pour le grand quotidien brésilien Estado de São Paulo, dont il est devenu le correspondant à Paris, lors de son retour en France en 1953. Un engagement, d´ailleurs, auquel Lapouge est toujours resté fidèle. Dans la presse française, que ce soit au Combat, au Monde, à la télé aux côtés de Bernard Pivot (Ouvrez les guillemets et Apostrophes) ou à France Culture, la parole de Gilles Lapouge était chaleureuse et empreinte de sagesse.


Ses vrais débuts littéraires datent de 1963 avec Soldats en déroute, alors qu´il était un journaliste mûr et expérimenté et avait déjà écrit, sous pseudonyme, Une blonde à Rio et Masque d´amour, à la demande d´un éditeur pour la collection «La série blonde». En 1969 il publiait Les pirates. Ce livre fait un tour d´horizon sur toutes catégories de pirates qui ont écumé les mers, à savoir «forbans, flibustiers, boucaniers et autres gueux de mer», selon la présentation de l´édition de mars 2001, parue dans la collection Libretto chez Phébus. De ce livre, François Nourissier a fait un commentaire fort élogieux dans le Figaro-Magazine : «Une sorte de professeur au Collège de France qui disposerait du style de Gracq et volerait aux altitudes de Saint-John Perse : Lapouge a composé là une vraie machine à enflammer l´imagination - un piège à rêves». Gilles Lapouge a écrit surtout des essais comme Utopie et civilisations, Anarchistes d´Espagne (en collaboration avec Jean Bécarud) et des livres où de petits riens du quotidien, se mêlent à des impressions de voyages et des réflexions journalistiques comme Bruit de neige, Besoin de mirages ou En étrange pays. Pourtant, sa connaissance du monde lui a aussi inspiré des romans comme Les folies Koenigsmark, L´incendie de Copenhague, La bataille de Wagram ou Mission des frontières. Dans son roman Le bois des amoureux, par exemple,  la mémoire de l´écrivain et les souvenirs d´enfance sont au rendez-vous d´une fiction où l´on retrouve un professeur – Monsieur Judrin, le protagoniste-rêveur, un soldat cantonnier, un curé philosophe et toute une gamme de personnages haut en couleur qui évoquent la France provinciale de l´entre-deux-guerres.  Son œuvre fut couronnée de nombreux prix dont le Prince Pierre de Monaco en 1990, le Grand Prix Henri-Gal de l´Académie Française, en 2002 et le Grand Prix de Littérature de la Société des Gens de Lettres en 2006.  
Les éditions Albin Michel ont récemment publié un nouveau recueil de textes de Gilles Lapouge au titre assez suggestif et plutôt cocasse : Maupassant, le sergent Bourgogne et Marguerite Duras. On retrouve dans ces chroniques ou essais-dont certains ont paru autrefois dans la collection «Grands auteurs » de France –Loisirs- toute la verve de Gilles Lapouge, son enthousiasme pour la littérature mais aussi pour la vie en général. 
Le grand écrivain russe Varlam Chalamov a écrit un jour que les livres sont ce que nous avons de meilleur en notre vie, ils sont notre immortalité. Ce recueil de Gilles Lapouge ne fait que confirmer ces sages paroles. Gilles Lapouge nous explique lui-même la magie des mots : «Un livre est une usine, la plus petite du monde et la plus robuste. Oubliez un roman dans la cave. Vingt ans plus tard, soufflez sur la poussière qui emmitoufle ses pages et vous entendez du bruit. Des bielles, des pistons vont et viennent. On dirait qu´un cœur se remet à battre et Mme Bovary appelle Rodolphe. Et le prince André meurt à la bataille de Borodino».
Ce recueil s´intitule Maupassant, le sergent Bourgogne et Marguerite Duras, mais il aurait pu tout aussi bien s´appeler Nabokov, le personnage August ou Jack London, non seulement parce que la littérature étrangère y a une place de choix au même titre que la langue française, mais aussi parce que les papillons de Nabokov, August, personnage de trois romans de Knut Hamsun, ou les aventures de Jack London sont tout aussi importantes et font également l´objet du regard d´entomologiste de Gilles Lapouge.
Quand on pense aux États-Unis, à cette vieille Amérique profonde, puritaine et repliée sur elle-même, on n´oublie certainement pas qu´il y a une autre Amérique inventive, ouverte et cosmopolite qui au dix-neuvième siècle (et jusqu´au début du vingtième siècle) était représentée par Henry James que Gilles Lapouge évoque dans «Henry James entre les deux rivages de l´Atlantique». Né à New York, le 15 avril 1843, il a visité l´Angleterre et la France dès son âge le plus tendre-il se rappellera toute sa vie qu´il a admiré, prouesse peu commune, la colonne Vendôme à deux ans-et plus tard a vécu en Europe. Dans son adolescence, à Paris, il fut inscrit dans une école inspirée par l´utopiste Charles Fourier. Il s´est enivré de littérature, pouvant sans mal reconnaître certains endroits qu´il visite grâce au souvenir des livres qu´il a lus. Devenu écrivain, il a fréquenté les grands auteurs français et anglais de l´époque. Aux Etats-Unis, on ne l´aime guère. On le tient pour un «écrivain dégénéré», ou «répugnant», un «déraciné efféminé». En France,  il est apprécié mais on se trompe de lecture : «on le voit soit comme un écrivain réaliste dans la grande ombre de Balzac, soit comme un Paul Bourget un peu perfectionné». Thomas Hardy le ridiculise, H.G.Wells déteste son «esthétisme stérile», en France dans les années soixante-dix, quelques décennies après sa mort, son œuvre est au zénith, du moins les structuralistes en font-ils leur miel. Quoi qu´il soit, Henry James était sans conteste un maître de la nouvelle. Il pouvait à coup sûr faire sienne la «trompeuse limpidité» qu´il admirait chez Guy de Maupassant».
Vladimir Nabokov, épris de papillons, de lacs et de prairies qui l´ont fait se nicher avec sa famille dans la paisible Suisse dans les deux dernières décennies de sa vie, Vladimir Nabokov, issu de la noblesse russe qui parlait très couramment, outre le russe bien entendu, le français, l´anglais  et l´allemand, ne s´encombrait pas d´indulgence et tirait à boulets rouges sur nombre d´autres écrivains fussent-ils contemporains ou classiques. Gilles Lapouge nous le rappelle : «Albert Camus est «horrible» et Sartre est pire. Dostoïevski est un journaliste verbeux, un comédien de boulevard. Ezra Pound est un crétin. Pasternak un pauvre romancier, comme Thomas Mann ou Faulkner. Gorki, Romain Rolland ou Tagore sont des «médiocrités formidables». Balzac et Stendhal sont plats et Joseph Conrad scintille comme une boutique de souvenirs exotiques…».Pourtant, Nabokov-qui,  vivant et enseignant aux États-Unis, regrettait d´avoir échangé le russe contre ce qu´il dénommait à tort un anglais de second ordre- était l´éblouissant romancier d´Ada ou l´ardeur et surtout de Lolita, histoire d´une nymphette de 12 ans qui a séduit Humbert Humbert, professeur de littérature. Le livre, on le sait, a fait scandale et fut d´abord publié en France en 1955 chez Olympia Press que dirigeait  Maurice Girodias, un éditeur qui publiait pas mal de livres pornographiques. De nos jours, la société est encore moins tolérante vis-à-vis de ce genre d´histoires. Aujourd´hui, Nabokov serait, soyons-en sûrs, cloué au pilori. Ce qui est étrange, c´est que Nabokov a affirmé que les nymphettes, il n´y connaissait rien du tout : «Lolita n´a pas de modèle. Elle est née dans mon esprit. Elle n´a jamais existé. En fait, je ne connais pas bien les petites filles. Quand j´y pense, je crois ne pas connaître une seule petite fille». Nabokov était-il sincère ? Ce n´est pas là la caractéristique première d´un romancier. Et pour cause, dirait-on…
Un autre écrivain controversé dont Gilles Lapouge brosse le portrait est Georges Simenon. Le créateur du commissaire Maigret, l´écrivain qui a écrit des milliers de pages, que Gide a célébré comme «notre plus grand romancier», admiré par Camus, Greene, Benjamin ou Faulkner, Georges Simenon a atteint la gloire alors que les intellectuels renâclaient devant le polar, le genre où il a excellé. Lapouge nous explique  ce qui a fait en quelque sorte son succès : « «L´art poétique» de l´auteur des Maigret est limpide. Austère. Rien ne doit distraire le lecteur de l´histoire qu´il est en train de lire(…) Seulement la phrase. Les mots nécessaires. Les mots inévitables et comme fatals. Mais alors, ne va-t-on pas se vouer à une écriture terne ? Non. À une écriture superbe car elle est invisible».  
Un des textes les plus amusants de ce livre s´intitule «Un jour dans la forêt amazonienne, j´ai inventé une langue» où Gilles Lapouge évoque des souvenirs de son séjour au Brésil. Il y est question des faux-amis en grammaire (mots qui ressemblent à des mots d´une autre langue, mais de sens différent) comme «luto» qui en portugais signifie «deuil» et non pas «lutte» (en portugais «luta») comme le croyait l´auteur, mais aussi d´une visite en Amazonie où on lui a présenté un professeur de français avec lequel il a entamé un dialogue de fous puisque ledit professeur parlait à peine le français-il le baragouinait, à vrai dire- et n´était visiblement pas satisfait de voir débarquer un Français susceptible de découvrir le pot aux roses. Gilles Lapouge ne l´a pas dénoncé et ils ont improvisé une langue avec des bribes de français et d´autres langues!
D´autres écrivains passent sous la plume élégante de Gilles Lapouge : Thomas Mann, Somerset Maugham, Tolstoï, Nicolas Bouvier, Baudelaire, Poe, Steinbeck. Zweig, Colette et quelques autres.   
 Pour Gilles Lapouge, l´écrivain est le grand alchimiste de la réalité, il n´y a pas de choses vraies ou de choses fausses, tout ce qui est écrit est vrai, comme il l´a souligné dans l´entretien paru dans l´édition déjà lointaine du Magazine Littéraire que j´ai citée plus haut. Avant cette affirmation, Anne-Marie Koenig lui avait néanmoins posé une question plus particulière, mais tout aussi importante : «Qu´est-ce qu´un romancier selon vous ?» La réponse de Gilles Lapouge est, on dirait bien, l´ex-libris de sa personnalité même : «C´est quelqu´un qui ne supporte pas de n´être que lui-même. Le romancier écrit pour faire éclater les limites de son destin et s´approprier tous les autres. Le destin appartient à l´arbitraire et à la solitude. Moi, la solitude me tue. Je veux toujours être l´autre, beaucoup d´autres…».
C´étaient les réflexions d´un voyageur sentimental, qui voyage probablement pour éluder la solitude, pour avoir d´autres vies, ou simplement pour collectionner des mirages…


Gilles Lapouge, Maupassant, le sergent Bourgogne et Marguerite Duras, éditions Albin Michel, Paris, février 2017.


mercredi 19 juillet 2017

Articles pour Le Petit Journal.




Vous pouvez lire sur l´édition Lisbonne du «Petit Journal» deux articles que j´ai récemment écrits : le premier sur le livre Trois-ex de Régine Detambel (éditions Actes Sud), mis en ligne en juin et le deuxième sur Hadamar d´Oriane Jeancourt Galignani (éditions Grasset), mis en ligne aujourd´hui même.

 http://www.lepetitjournal.com/lisbonne/a-voir-a-faire/culture/282511-litterature-trois-ex-de-regine-detambel
          
http://www.lepetitjournal.com/lisbonne/a-voir-a-faire/culture/286389-litterature-hadamar-une-fiction-d-oriane-jeancourt-galignani






jeudi 13 juillet 2017

Liu Xiaobo: une mort annoncée.


L´écrivain dissident chinois Liu Xiaobo qui s´était vu décerner le prix Nobel de la Paix en 2010 est mort ce jeudi 13 juillet à l´âge de 61 ans. Il avait été libéré de prison le 26 juin après avoir eté diagnostiqué d´un cancer du foie en pahse terminale  Il purgeait une peine de onze ans de prison depuis 2009 pour «subversion».
Pour en savoir davantage sur ce combattant de la liberté, je vous conseille la lecture de la chronique que je lui ai consacrée en juillet 2011(voir chronique de juillet 2011 dans les archives de ce blog).